Localisation: France/Centre-Val de Loire/Cher
Site : Genouilly - Butte du Moton
Province romaine: Aquitania
Peuple gaulois: Bituriges Cubi
Support: stèle
Matériau: grès
Description du support: Grande stèle funéraire et votive grossièrement taillée en grès local gris jaunâtre, avec concrétions et veinures bleutées ou (dans le bas) rougeâtres. Un ressaut la traverse obliquement, accroissant de 4 cm l'épaisseur de la pierre dans sa moitié inférieure. Postérieurement aux gravures des inscriptions, il s'est produit plusieurs brisures latérales, mutilant les textes : obliquement, en haut à gauche (perte de tout le coin supérieur) ; longitudinalement, sur les portions médianes et inférieures droite (cette brisure étant d'apparence plus récente que les deux autres). Dans son état actuel, la pierre est haute de 114 cm ; largeur : 55 cm en bas et à mi-hauteur, 32 cm au niveau de la l.1 ; épaisseur : 17 cm au-dessous du ressaut transversal (à la hauteur de la l.5), 13 cm immédiatement au-dessus du ressaut, diminuant ensuite progressivement vers le haut, 7 cm ou 5 cm au sommet ; postérieurement aux inscriptions, des fractures ont mutilé la stèle à gauche et à droite.
Remarques de Michel Lejeune : G225-L4
Première observation : il y a lieu de distinguer deux secteurs (A, B) inscrits par des mains différentes, à des moments différents.
Deuxième observation : les divers éléments de la stèle I (CHE-01-01), tout comme l'élément unique de la stèle II (CHE-01-02), sont tous rédigés en langue gauloise, à une exception près, strictement ponctuelle : dans un contexte gaulois, le scribe de la stèle I (CHE-01-01) secteur A, par affection d'hellénisme, a remplacé αυουωτ par εποει. Rien, linguistiquement, n'est latin.
Deuxième observation : les divers éléments de la stèle I (CHE-01-01), tout comme l'élément unique de la stèle II (CHE-01-02), sont tous rédigés en langue gauloise, à une exception près, strictement ponctuelle : dans un contexte gaulois, le scribe de la stèle I (CHE-01-01) secteur A, par affection d'hellénisme, a remplacé αυουωτ par εποει. Rien, linguistiquement, n'est latin.
État de conservation: Inscription endommagée.
Lieu de découverte: Genouilly
Contexte local: La butte du Moton est une butte artificielle remontant au Moyen Âge, et relevant d'un type connu de structures défensives féodales ; elle est faite entièrement de matériaux rapportés : terres, sables, pierres, prélevés probablement dans les environs, mais de zone d'extraction non précisément connue. Un essai de recherche de contexte dans les stèles, effectué sur le tertre même, ne pouvait donc donner de résultats. « Un sondage a été pratiqué à mon investigation sur le moton de Genouilly, il y a plusieurs années. Une coupe du fossé a donné, dans les terres superficielles remaniées, quelques fragments de tuiles à rebord et quelques éclats de silex atypiques. Le sondage a été prolongé dans la masse même de la motte sur 1 m en direction au centre ; il y a été recueilli une petite série lithique de facture mésolithique, apportée avec les sables constituant la motte » (Lettre, en date du 25/02/82, du Dr Allain, ancien direction de la circonscription préhistorique du Centre).
Conditions de découverte: Au nord-est du territoire communal de Genouilly « existe une petite forteresse en terre, connue... sous le nom de... "Moton"..., diminutif... de "Motte"... : c'est une enceinte rectangulaire de 38 m de côté sur 32 m, protégée par un fossé peu profond, de 8 m de largeur. Le 8 janvier 1894 des ouvriers terrassiers découvrirent, sur le bord extérieur de ce fossé, un grand bloc de grès du pays, reposant sur des tuiles d'apparence romaine, et qui portait huit lignes d'inscription... (CHE-01-01) ; bientôt vint le rejoindre une autre pierre de même nature, offrant une inscription d'une seule ligne, découverte peu de jours après (CHE-01-02) » (début de l'article de Laugardière, (Laugardière 1894a ).
Historique de conservation: Les deux stèles (CHE-01-01 et CHE-01-02) sont conservées à Bourges au Musée du Berry (inv. 268 et 269).
Lieu de conservation: Bourges
Institution de conservation: Musée du Berry
N° inventaire: 1950.1.1
Autopsie: Seuls de ces auteurs à avoir examiné les originaux : Laugardière en 1894, Rhŷs en 1909, Whatmough en 1929.
Photographié pour le projet RIIG par Joaquín Gorrochategui en novembre 2021 au musée du Berry. Numéro d'inventaire : 1950.1.1.
Description de l'inscription:
G225-L4-A Le secteur A comporte trois mentions (l.1, l.2, l.3-4) toutes d'une même main. L'ensemble A comporte quatre lignes ; l.1 en caractères latins ; l.2-4 en caractères grecs. Dispositif graphique mettant en évidence un sous-ensemble Aa (l.1-2) et un sous-ensemble Ab (l.3-4), séparés par un blanc de 6 cm (plus aéré et mieux en vue au milieu de la ligne). Une fracture verticale du bord droit a légèrement mutilé le champ ; il manque une lettre à la fin de la l.2 (restituer une finale ...ο[ς], pareille aux deux finales -os de la l.1, et aux deux finales -oς subsistantes des lignes 3-4). Une fracture oblique du bord gauche a, plus sévèrement, mutilé (de plusieurs lettres) les débuts des lignes 1 et 2. Usage à la fois de l'alphabet grec (l.2 ; l. 3-4) et de l'alphabet latin (l.1) par le lapicide. Précisons tout de suite qu'en dépit de Rhŷs, Dottin, Whatmough, le document n'est pas « trilingue ». Haut de la l.1 à 5 cm à gauche, 8 cm à droite, du sommet (irrégulier) de la face inscrite.
G225-L4-B L'ensemble B est un texte gallo-latin sur quatre lignes (l.5-8) ; débuts de lignes intacts ; à droite, une fracture a emporté le bord ancien ; il ne manque rien, cependant, à la fin de la l.6 (la finale en -o est cautionnée par les finales en -o des lignes 7 et 8) ; mais le x final de la l.7, dont il ne subsiste que la partie gauche, a été méconnu par tous les éditeurs (P.-M. Duval, le premier, a reconnu, et m'a signalé, la lettre). Usage de l'alphabet latin uniquement. Le champ est intact à gauche mais à été entamé à droite par une cassure postérieure à la gravure.
Description de l'écriture:
G225-L4-A Lettres capitales ; l.1 : lettres de 30 mm à 40 mm de haut, interligne 1-2 de 10 mm à 15 mm, l.2 lettres de 30 mm à 35 mm ; après un blanc haut de 6 cm, l.3 : lettres de 30 mm à 45 mm, interligne 3-4 de 25 mm à 30 mm ; l.4 : lettres de 35 mm à 45 mm. Lignes 2-4 : epsilon et sigma lunaires.
- L.1 : dans le patronyme, on a cherché à trouver -ll- (en regard de -λλ- de la l.2), soit (Laugardière en imaginant que la haste verticale est nettement plus haute que les lettres voisines, soit (Rhŷs) en imaginant qu'il y a deux traits horizontaux parallèles. Rien de tout cela sur la pierre. Se résoudre à reconnaître, ce qui est banal, le caractère facultatif et la notation inconstante de telles géminations expressives.
- L.2 (début) : Avant τ, extrémité inférieure droite soit d'un ε lunaire, soit d'un σ lunaire. Donc idionyme en ...]etos ou ...]stos.
- L.2 (fin) : On a deux fois -os à la l.1, une fois -ος au début de la l.2, une fois -ος à la l.3. L'usage du lapicide de la stèle I secteur A ll.1-2 (à la différence du lapicide de la stèle I secteur A ll.3-4) paraît donc bien être de noter régulièrement la sifflante après voyelle en fin de mot. Si elle marque aujourd'hui dans ουιριλλι (l.2) c'est probablement par accident : l'actuel bord droit, qui passe au ras du ο, résulte d'une cassure qui a emporté le [ς] final.
G225-L4-B Lettres capitales de 40 mm à 60 mm de haut, avec faibles interlignes ( 8 mm à 16 mm). Écriture irrégulière et malhabile ; E pour e ; le i de ieuru n'est certes pas I longa, comme le prétend Whatmough ; les o maladroits à base imparfaitement arrondie (comme le dernier o du oclicno) ne sont pas les omégas (!) que croit voir Rhŷs (c'est un de ses phantasmes ; cf. ALL-01-01).
- L.5 : Mot unique. L.6-7 : deux mots séparés par interponctions. L.8 : Mot unique isolé en milieu de ligne.
- L.6 : Alors qu'il y a un large blanc après V de la l.5, un blanc moindre mais incontestable après O de la l.8, l'actuel bord droit (résultant d'une cassure récente) passe au ras du O de la l.6 ; il aurait donc possibilité matérielle pour qu'une lettre finale de mot fût perdue l.6. Mais il est clair que Aneuno est syntaxiquement parallèle à Oclicno et à Aneunicno. De quelque façon qu'on interprète cette finale -o, il n'est pas douteux que nous ayons la l.6 au complet. À en croire Rhŷs, ces trois -O finaux se distingueraient des O (circulaires) intérieur (l.5) et initial (l.7) par une forme particulière (base rectiligne horizontale) qui en ferait des Ω (et c'est ainsi qu'il les transcrit). Distinction tout à fait illusoire, mésinterprétant une certaine maladresse du lapicide du secteur B à réaliser des cercles.
- L.7 : LVGVRI [sic] est donné comme un mot complet par Dottin et Whatmough. Cependant, après RI, Rhŷs apercevait ce qu'il prenait pour une interponction triangulaire ; et déjà Laugardière e 1894 signalait la « un semblant de jambage l'A ; si ce n'est pas une simple fissure naturelle..., ce serait... l'initiale inachevée et reportée à la ligne suivante » de Aneunicno. En fait, il s'agit d'une lettre que la brisure du bord droit à mutilée : une haste, non-verticale, mais inclinée, de bas en haut, de gauche à droite, qui vient recouper perpendiculairement un trait transversal dont subsiste la partie gauche et l'amorce de la partie droite. Donc, X.
Type de texte:
G225-L4-Aa Inscription funéraire
G225-L4-Ab Signature de l'artisan
G225-L4-B Inscription religieuse / cultuelle
Datation du texte: deuxième moitié du Ier siècle
Justificatif de datation: contexte. Assigner tout l'ensemble de Genouilly aux deux derniers tiers du Ier.
Niveau de certitude: ◉◉◉
Remarques de Michel Lejeune :
Entre le moment de la stèle CHE-01-01 secteur A et celui du secteur B (donc, aussi, de la stèle CHE-01-02), il s'est écoulé au plus quelques dizaines d'années, puisque le même personnage figure sur la stèle I secteur A l.3 et secteur B l.6. Dans le premier de ces deux temps, la notation gallo-grecque existe encore, mais est concurrencée déjà par l'alphabet latin, et est sentie comme d'avenir incertain, puisqu'on juge utile de doubler ουιριλλιος par VIRILIOS. En se référant aux données chronologiques fournies par Alise-Ste-Reine, on ne se trompera sans doute guère en assignant tout l'ensemble de Genouilly aux deux derniers tiers du Ier de notre ère.
Édition corpus: RIG I p. 329-339 ; RIG I p. 333 fig. 277 ; RIG II.1 p. 83-89 ; RIG II.1 p. 84-88 fig. 36-40 .
Commentaire bibliographique: CIL XIII-1 (1326) ; CIL XIII-4 (1326) ; Rhŷs 1906 p. 326-327 (XXXIa) ; Arbois de Jubainville 1894 p. 236-237 ; Laugardière 1894a p. 127-137 ; Laugardière 1894a pl. IX ; p. 160-164 ; Thurneysen 1908 p. 558 ; Rhŷs 1911 p. 313-319 ; Rhŷs 1911 pl. VIII ; Dottin 1918 p. 45-46 ; Whatmough 1949 p. 10 ; Vendryes 1957 p. 207 ; Holder 1962 ; Evans 1967 ; Whatmough 1970 p. 145-146 ; Lejeune 1980a p. 116-118 ;
Texte 1 G225-L4-Aa
01 [ ··4-5·· T]ỌS▴VIRILIOS 02 [ ··4-5·· ]ΤΟΣ▴ΟΥΙΡΙΛΛΙΟ[ . ] |
01 [ ··4-5·· t]ọs uirilios 02 [ ··4-5·· ]τος ουιριλλιο[ς] |
01 [ ··4-5·· t]ọs uirilios 02 [ ··4-5·· ]τος ουιριλλιο[ς] |
idionyme nominatif masc. sg. thème en -o patronyme nominatif masc. sg. thème en -o idionyme nominatif masc. sg. thème en -o patronyme nominatif masc. sg. thème en -o |
Texte 2 G225-L4-Ab
03 ΑΝЄΟΥΝΟΣ 4 ΕΠΟЄΙ |
03 ανεουνος 4 εποει |
03 ανεουνος 4 εποει |
idionyme nominatif masc. sg. thème en -o verbe 3e pers. sg. prétérit |
Texte 3 G225-L4-B
05 ELVONTIV 06 IEVRV▴ANEVNO 07 OCLICNO▴LVGVRIX̣ 8 ANEVNICNO |
05 eluontiu 06 ieuru(s) aneuno(s) 07 oclicno(s) lugurix̣ 8 aneunicno(s) |
05 ELVONTIV 06 IEVRV▴ANEVNO 07 OCLICNO▴LVGVRIX̣ 8 ANEVNICNO |
05 eluontiu 06 ieuru aneuno(s) 07 oclicno(s) lugurix̣ 8 aneunicno(s) |
05 ELVONTIV 06 IEVRV▴ANEVNO 07 OCLICNO▴LVGVRIX̣ 8 ANEVNICNO |
05 eluontiu 06 ieuru aneuno(s) 07 oclicno(s) lugurix̣ 8 aneunicno(s) |
05 ELVONTIV 06 IEVRV▴ANEVNO 07 OCLICNO▴LVGVRI 8 ANEVNICNO |
05 eluontiu 06 ieuru aneuno 07 oclicno luguri 8 aneunicno |
05 eluontiu 06 ieuru(s) aneuno(s) 07 oclicno(s) lugurix̣ 8 aneunicno(s) |
théonyme datif masc. sg. thème en -o verbe 3e pers. pl. prétérit idionyme nominatif masc. sg. patronyme nominatif masc. sg. thème en -o idionyme nominatif masc. sg. thème consonantique patronyme nominatif masc. sg. |
05 eluontiu 06 ieuru aneuno(s) 07 oclicno(s) lugurix̣ 8 aneunicno(s) |
théonyme datif masc. sg. thème en -o verbe 3e pers. sg. prétérit idionyme nominatif masc. sg. patronyme nominatif masc. sg. thème en -o idionyme nominatif masc. sg. thème consonantique patronyme nominatif masc. sg. |
05 eluontiu 06 ieuru aneuno(s) 07 oclicno(s) lugurix̣ 8 aneunicno(s) |
idionyme datif sg. verbe 3e pers. sg. prétérit idionyme nominatif masc. sg. patronyme nominatif masc. sg. thème en -o idionyme nominatif masc. sg. thème consonantique patronyme nominatif masc. sg. |
05 eluontiu 06 ieuru aneuno 07 oclicno luguri 8 aneunicno |
idionyme nominatif masc. sg. thème consonantique verbe 3e pers. sg. prétérit idionyme datif masc. sg. thème en -o idionyme datif masc. sg. thème en -o idionyme datif masc. sg. thème en -i idionyme datif masc. sg. thème en -o |
Traduction:
de Michel Lejeune : MLE-1-a
[...t]os fils de Virillos / [...]tos fils de Virillos
de Michel Lejeune : MLE-2-a
Aneunos l'a fait.
de Michel Lejeune : MLE-3-a
Pour Éluontios, ont offert : Aneunos fils d'Oclos et Lugurix fils d'Aneunos.
de Pierre-Yves Lambert : PLT-3-a
Aneunos fils d'Oclos et Lugurix fils d'Aneunos (l') on offert à Éluontios.
Apparat critique:
Remarques de Michel Lejeune : MLE-1-a
Le sous-secteur Aa (l.1-2) constitue à lui seule une inscription digraphe. Un même énoncé (en fait, réduit à une désignation d'homme au nominatif) est écrit deux fois, pour plus de sûreté, d'abord dans l'alphabet qui semble celui de l'avenir, ensuite dans l'alphabet jusque-là en usage, mais menacé. On notera que la version gallo-grecque (l.2) a emprunté à l'usage du latin (suivi à la l.1) l'interponction.
Désignation bimembre du défunt par idionyme + adjectif patronymique en -yo-. Du premier mot ne subsiste que les dernières lettres ; il manque peut-être quatre ou cinq signes au début de la l.2, cinq ou six au début de la l.1. La version en écriture grecque paraît avoir occupé plus d'espace que la version en écriture latine, soit que le digramme ου ait figuré dans l'une en regard d'un V de l'autre, soit que les géminées aient figuré dans l'une, non dans l'autre (les deux circonstances étant, d'ailleurs, illustrées par ουιριλλιος / VIRILIOS).
De même que dans nos dédicaces ou épitaphes bilingues (Verceil : *E-2, Todi : *E-5) le texte latin précède le texte gaulois, la graphie gallo-latine ici précède la graphie gallo-grecque : on veut assurer la pérennité du message, et on est à une époque où l'on sent déjà que l'avenir est du côté du latin.
Idionyme non-restituable. Soit indigène, soit romain (nous sommes à l'époque du Doiros Segomari de Couchey aussi bien que du Martialis Dannotali d'Alise-Sainte-Reine) ; il ne s'agit pas, en tout cas, d'un prénom : les vestiges de la lettre précédant -τ à la l.2 excluent qu'on songe à un Quintos ou à un Sextos. La version en écriture grecque paraît avoir occupé plus d'espace que la version en écriture latine, soit que le digramme ου ait figuré dans l'une en regard d'un V de l'autre, que des géminées aient figuré dans l'une et non dans l'autre (la notation des géminées est facultative) : les deux circonstances sont illustrées par ουιριλλιος/VIRILIOS.
Le nom Viri(l)los du père est abondamment attesté (Holder 1962 III (382 sv.)). Ce nom (sur quoi Evans 1967 pp. 477) est à interpréter comme hypocoristique en -i(l)lo- (Holder 1962 II (34 sv.)) de composés en Viro- (Schmidt 1957 pp. 296).
Désignation bimembre du défunt par idionyme + adjectif patronymique en -yo-. Du premier mot ne subsiste que les dernières lettres ; il manque peut-être quatre ou cinq signes au début de la l.2, cinq ou six au début de la l.1. La version en écriture grecque paraît avoir occupé plus d'espace que la version en écriture latine, soit que le digramme ου ait figuré dans l'une en regard d'un V de l'autre, soit que les géminées aient figuré dans l'une, non dans l'autre (les deux circonstances étant, d'ailleurs, illustrées par ουιριλλιος / VIRILIOS).
De même que dans nos dédicaces ou épitaphes bilingues (Verceil : *E-2, Todi : *E-5) le texte latin précède le texte gaulois, la graphie gallo-latine ici précède la graphie gallo-grecque : on veut assurer la pérennité du message, et on est à une époque où l'on sent déjà que l'avenir est du côté du latin.
Idionyme non-restituable. Soit indigène, soit romain (nous sommes à l'époque du Doiros Segomari de Couchey aussi bien que du Martialis Dannotali d'Alise-Sainte-Reine) ; il ne s'agit pas, en tout cas, d'un prénom : les vestiges de la lettre précédant -τ à la l.2 excluent qu'on songe à un Quintos ou à un Sextos. La version en écriture grecque paraît avoir occupé plus d'espace que la version en écriture latine, soit que le digramme ου ait figuré dans l'une en regard d'un V de l'autre, que des géminées aient figuré dans l'une et non dans l'autre (la notation des géminées est facultative) : les deux circonstances sont illustrées par ουιριλλιος/VIRILIOS.
Le nom Viri(l)los du père est abondamment attesté (Holder 1962 III (382 sv.)). Ce nom (sur quoi Evans 1967 pp. 477) est à interpréter comme hypocoristique en -i(l)lo- (Holder 1962 II (34 sv.)) de composés en Viro- (Schmidt 1957 pp. 296).
Remarques de Michel Lejeune : MLE-2-a
Le sous-secteur Ab (l.3-4) constitue un nouvel énoncé : signature avec idionyme seul (comme ailleurs : cf. CDO-01-01, CDO-01-02, CDO-02-01) et verbe « fēcit », la surprise étant qu'à αυουωτ, que l'on attend, est ici substitué son équivalent grec ἐπόει. Personnage qui, normalement, reste ici au second plan par rapport au défunt ; d'où sa désignation par idionyme seul.
Ne pas imaginer pour autant que le lapicide de la stèle I secteur A fût grec : premièrement, le grec pourrait avoir, mais n'a pas, de composé **ἄν-ευνος, ni, donc, de sobriquet en dérivant ; deuxièmement, la graphie -εου- de la diphtongue eu est spécifiquement gauloise ; un Grec aurait écrit, dans son propre nom, -ευ-, à la grecque ; troisièmement, la stèle I secteur B nous le montre encadré, entre un père Oclos et un fils Lugurix, dans une lignée bien gauloise. Assigner donc le noms Aneunos au répertoire indigène, même si les rapprochements invocables demeurent médiocres (Evans 1967 pp. 51). Point hellène, donc, mais hellénomane.
Ne pas imaginer pour autant que le lapicide de la stèle I secteur A fût grec : premièrement, le grec pourrait avoir, mais n'a pas, de composé **ἄν-ευνος, ni, donc, de sobriquet en dérivant ; deuxièmement, la graphie -εου- de la diphtongue eu est spécifiquement gauloise ; un Grec aurait écrit, dans son propre nom, -ευ-, à la grecque ; troisièmement, la stèle I secteur B nous le montre encadré, entre un père Oclos et un fils Lugurix, dans une lignée bien gauloise. Assigner donc le noms Aneunos au répertoire indigène, même si les rapprochements invocables demeurent médiocres (Evans 1967 pp. 51). Point hellène, donc, mais hellénomane.
Remarques de Michel Lejeune : MLE-3-a
Dédicace de type ieuru (voir VIE-01-01). Sur l'ensemble du dossier ieuru, voir Lejeune 1980a .
Deux dédicants (chacun désigné par idionyme + adj. patronymique en -icnos ) : Aneuno Oclicno et Lugurix Aneunicno. Apparaît là une singularité phonétique (étrangère à A) : graphie -o pour -os. D'où résulte, accessoirement, que Aneunos n'a pas été le rédacteur de A et de B (est-ce le jeune Lugurix qui ne prononce plus les -s ?). Mais on en inférera une conséquence plus importante pour le verbe.
On sait qu'au prétérit, à une 3e sg. en -u s'oppose une 3e pl. en -us (KARNITU, *E-5 / KARNITUS, E-1 ; ieuru, fréquent/iourus, *CDO-02-01). Plutôt que d'imaginer ici le verbe en accord, au singulier, avec le sujet le plus proche, on estimera qu'il s'accorde, au pluriel, avec l'ensemble des deux sujets en asyndète, et on entendra, avec cette même omission de la sifflante finale, ieuru(s).
Dans les autres exemples d'énoncé votif ieuru, le verbe toujours suit le sujet (Lejeune 1980a ) ; inversion exceptionnelle ici, conséquence probable de la mise en relief du datif en tête de phrase (alors qu'ailleurs il suit le verbe). Datif en -ū d'un nom propre Elvontios ; il manifeste, devant suffixe -ont-, la même souche Elu- que les noms de personnes ελουισσα (VAU-05-05), ηλουσϰονιος (BDR-12-06), cf. Evans 1967 pp. 347 ; mais rien n'exclut que la souche puisse aussi avoir fourni un théonyme. Il paraît moins onéreux de supposer, en Eluontios, un nom divin que d'admettre pour ieuru, une seule fois sur douze, un emploi non religieux.
Deux dédicants (chacun désigné par idionyme + adj. patronymique en -icnos ) : Aneuno Oclicno et Lugurix Aneunicno. Apparaît là une singularité phonétique (étrangère à A) : graphie -o pour -os. D'où résulte, accessoirement, que Aneunos n'a pas été le rédacteur de A et de B (est-ce le jeune Lugurix qui ne prononce plus les -s ?). Mais on en inférera une conséquence plus importante pour le verbe.
On sait qu'au prétérit, à une 3e sg. en -u s'oppose une 3e pl. en -us (KARNITU, *E-5 / KARNITUS, E-1 ; ieuru, fréquent/iourus, *CDO-02-01). Plutôt que d'imaginer ici le verbe en accord, au singulier, avec le sujet le plus proche, on estimera qu'il s'accorde, au pluriel, avec l'ensemble des deux sujets en asyndète, et on entendra, avec cette même omission de la sifflante finale, ieuru(s).
Dans les autres exemples d'énoncé votif ieuru, le verbe toujours suit le sujet (Lejeune 1980a ) ; inversion exceptionnelle ici, conséquence probable de la mise en relief du datif en tête de phrase (alors qu'ailleurs il suit le verbe). Datif en -ū d'un nom propre Elvontios ; il manifeste, devant suffixe -ont-, la même souche Elu- que les noms de personnes ελουισσα (VAU-05-05), ηλουσϰονιος (BDR-12-06), cf. Evans 1967 pp. 347 ; mais rien n'exclut que la souche puisse aussi avoir fourni un théonyme. Il paraît moins onéreux de supposer, en Eluontios, un nom divin que d'admettre pour ieuru, une seule fois sur douze, un emploi non religieux.
Remarques de Michel Lejeune : MauLE-2-a RTN-2-a MLE-3-a
Chez Laugardière (Laugardière 1894a ) puis d'Arbois (Arbois de Jubainville 1894 ) et Rhŷs (Rhŷs 1911 ), construction : sujet (Eluontiu + verbe + datif (en -O et en -I, avec lecture Luguri). Une difficulté, pour -O, a été perçue par d'Arbois : pourquoi deux traitements de -ō dans Eluontiu (nominatif singulier de thème à nasale) et Aneuno, etc ? Il proposait de considérer les finales en -ō comme des latinismes. Autre difficulté pour le -I, le seul remède étant d'imaginer, sans aucun parallèle allégable dans l'énorme série des noms en -rīx, un doublet *Luguris (thème en -i-) de Lugurix, doublet-fantôme accueilli par nos répertoires onomastiques.
Thurneysen (Thurneysen 1908 ) inverse l'interprétation : datif (Eluontiu) + verbe + sujets (deux désignations masculines en asyndète, le verbe s'accordant au singulier avec le sujet le plus proche). Il est suivi par Dottin (voir Dottin 1918 pp. 66 donnant Aneuno comme nominatif), Whatmough (Whatmough 1949 pp. 10 : « Ἀνέουνος ἐπόει is the exact equivalent of ieuru Aneuno(s) », Evans (Evans 1967 pp. 51). Ceci au prix de l'hypothèse que, dans l'usage du lapicide du secteur B, la sifflante finale après voyelle était amuïe (voir en dernier lieu Evans 1967 pp. 397), cet amuïssement affectant aussi bien le *Luguris supposé, qui deviendrait Luguri.
La lecture LVGVRIX (déjà renseignée chez Lejeune 1980a ) tranche décisivement en faveur de la construction de Thurneysen (tout en supprimant, accessoirement, la difficulté que le prétendu *Luguri(s) soulevait).
Une conséquence (non perçue par Lejeune 1980a ) est la suivante : si (comme il est désormais nécessaire de l'admettre), le lapicide du secteur B n'écrit pas -s final après voyelle, le verbe peut aussi bien, ou mieux, s'entendre ieuru(s), au pluriel comme le iourus de Saint-Germain-Source-Seine (CDO-02-01).
Lignée ici définie sur trois générations : Oclos → Aneunos → Lugurix. Une fois écartée toute présomption de grécité pour Aneunos, il est clair que les trois noms sont de stock indigène, même si les souches dont relèvent Oclos (cf. Evans 1967 pp. 106) et Aneunos (cf. Evans 1967 pp. 51) ne sont que très médiocrement attestées ; Lugurix est, lui aussi, un hapax (cf. Evans 1967 pp. 99), mais composé, et, de ce fait, analysable, avec premier terme Lugu- (Schmidt 1957 pp. 233, Evans 1967 pp. 219) et un banal second terme -rīx.
Thurneysen (Thurneysen 1908 ) inverse l'interprétation : datif (Eluontiu) + verbe + sujets (deux désignations masculines en asyndète, le verbe s'accordant au singulier avec le sujet le plus proche). Il est suivi par Dottin (voir Dottin 1918 pp. 66 donnant Aneuno comme nominatif), Whatmough (Whatmough 1949 pp. 10 : « Ἀνέουνος ἐπόει is the exact equivalent of ieuru Aneuno(s) », Evans (Evans 1967 pp. 51). Ceci au prix de l'hypothèse que, dans l'usage du lapicide du secteur B, la sifflante finale après voyelle était amuïe (voir en dernier lieu Evans 1967 pp. 397), cet amuïssement affectant aussi bien le *Luguris supposé, qui deviendrait Luguri.
La lecture LVGVRIX (déjà renseignée chez Lejeune 1980a ) tranche décisivement en faveur de la construction de Thurneysen (tout en supprimant, accessoirement, la difficulté que le prétendu *Luguri(s) soulevait).
Une conséquence (non perçue par Lejeune 1980a ) est la suivante : si (comme il est désormais nécessaire de l'admettre), le lapicide du secteur B n'écrit pas -s final après voyelle, le verbe peut aussi bien, ou mieux, s'entendre ieuru(s), au pluriel comme le iourus de Saint-Germain-Source-Seine (CDO-02-01).
Lignée ici définie sur trois générations : Oclos → Aneunos → Lugurix. Une fois écartée toute présomption de grécité pour Aneunos, il est clair que les trois noms sont de stock indigène, même si les souches dont relèvent Oclos (cf. Evans 1967 pp. 106) et Aneunos (cf. Evans 1967 pp. 51) ne sont que très médiocrement attestées ; Lugurix est, lui aussi, un hapax (cf. Evans 1967 pp. 99), mais composé, et, de ce fait, analysable, avec premier terme Lugu- (Schmidt 1957 pp. 233, Evans 1967 pp. 219) et un banal second terme -rīx.
Commentaires:
Remarques de Pierre-Yves Lambert : PLT-3-a
Le groupe sujet comporte deux noms d'hommes, chacun ayant la double dénomination (nom individuel + patronyme en -icnos). Le verbe est resté à la 3e personne du singulier, comme s'il était en facteur commun. Parallèlement, les deux dénominations n'ont pas été coordonnées : comme s'il s'agissait de deux personnages naturellement associés. Effectivement, le second est fils du premier : nous avons Aneunos fils d'Oclos, puis Lugurix fils d'Aneunos. Lambert 2018 pp. 96
La chute de -s final dans les trois nominatifs en -os est un trait du gaulois tardif. Lambert 2018 pp. 96
La chute de -s final dans les trois nominatifs en -os est un trait du gaulois tardif. Lambert 2018 pp. 96
Remarques de David Stifter : MLE-2-a
The spelling three times of the names ΑΝΕΟΥΝΟΣ, ANEVNO, ANEUNICNO with -eu- instead of -ou- suggests that it does not contain an old example of *eu̯/ou̯, but rather that -eu- arose secondarily from something else. Two options are *anemno- > *aneμno- > aneuno-, or *ande-gwn-o- > *an(d)eu̯no- > aneuno-. For the latter, cf. pre-Celt. *n̥dhi-gwhn-eh2- ‘striking into’ > PC *ande-gwnā- > OIr. indén, OBret. anemn, Bret. annev, LCorn. anụan ‘anvil’ Stifter 2020 pp. 292.
Commentaire sociolinguistique:
Remarques de Michel Lejeune : MLE-1-a MLE-2-a MLE-3-a
La signification du monument dans son ensemble est, et risque de demeurer, l'objet de controverses, à cause de sa singularité. Il n'a pas de correspondants satisfaisants dans notre épigraphie gauloise tant funéraire que votive, mais donne l'impression de relever partiellement de l'une et de l'autre, ce qui supposerait une réutilisation (B) de la pierre à des fins au moins en partie différentes de son utilisation première (A) ; on imaginera alors que l'intervention d'Aneunos en A lui a, de quelque façon, conféré des droits sur la pierre, autorisant ainsi son intervention ultérieure (B).
Autre source d'embarras : le αυουωτ qu'il faut supposer en A sous-jacent à sa traduction εποει n'a pas exactement la même signification (à cause de la différence des contextes) que αυουωτ / AVVOT banal. Et il n'est pas exclu non plus que le sens de IEVRV se trouve aussi ici, de par le contexte, gauchi.
Ce dit, on proposera la discussion suivante, sans en tenir les conclusions pour parfaitement assurées :
Autre source d'embarras : le αυουωτ qu'il faut supposer en A sous-jacent à sa traduction εποει n'a pas exactement la même signification (à cause de la différence des contextes) que αυουωτ / AVVOT banal. Et il n'est pas exclu non plus que le sens de IEVRV se trouve aussi ici, de par le contexte, gauchi.
Ce dit, on proposera la discussion suivante, sans en tenir les conclusions pour parfaitement assurées :
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Les positions relatives du secteur A et du secteur B sur la stèle I, tout comme l'appartenance partielle de A à la phase gallo-grecque alors que B est gallo-latin, établissent que A est antérieur à B (dans la limite d'une vie d'homme, puisque Aneunos intervient en A et en B).
C'est donc au texte A qu'il faudra demander quelle a été l'utilisation première, et fondamentale, du monument (que la réutilisation B soit ou non-conforme à cette destination initiale).
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Or l'ensemble A est lui-même constitué d'une donnée essentielle (nom de X, fils de Viri(l)los, au nominatif, en deux graphies différentes visant à assurer la pérennité de la lecture) et d'une donnée accessoire à verbe εποει (le sujet étant un idionyme sans patronyme). La première donnée aurait pu suffire à elle seule de légende à la stèle.
Autant il est banal qu'un épitaphe se réduire au nom du défunt (le plus souvent, comme ici, au nominatif), autant il est exceptionnel qu'une dédicace se réduise au nom de l'offrant. Ceci conduit donc à définir la stèle I (et, par récurrence, la stèle II) comme monument funéraire.
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Les lignes 1-2 étant ainsi reconnues comme désignations d'un défunt, reste à s'interroger sur la nature exacte de l'intervention d'Aneunos aux lignes 3-4.
Nous disposons d'un abondant matériel où αυουωτ / AVVOT relayé ensuite par FECIT, est un verbe de signature d'artisan, le plus souvent sur de la porterie, mais aussi bien à l'occasion sur d'autres productions artisanales (ainsi, statuaire de pierre signée σαμοταλος αυουωτ à Alise-Sainte-Reine : CDO-01-02, δαγολιτους αυο˂υω˃τ à Saint-Germain-Source-Seine : CDO-02-01). Mais ici on se demandera légitimement si le malhabile dégrossissage de cette stèle de grès méritait signature, et si Aneunos est un lapicide (s'il l'était, au reste, n'attendrait-on pas que A et B fussent de la même main ?).
Mais FECIT se trouve avoir, en épigraphie latine, une autre série d'emplois, très abondamment attestée : « Un Tel a fait faire (ce monument funéraire), soit pour Tel Autre (curatelle), soi pour soi-même et les siens ». Il est raisonnable de supposer que αυουωτ (et le εποει qui le traduit ici) peut aussi avoir cette signification, et que seul le hasard nous prive jusqu'ici, d'autres exemples. En fait, notre épigraphie funéraire gauloise est pauvre ; dans ce petit nombre d'épitaphes, les cas de curatelle de comptent sur les doigts d'une main, et s'expriment elliptiquement par une phrase nominale « X. pour Y. » (nominatif + datif). D'où l'isolement de notre εποει.
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En un premier temps (A) donc, pierre funéraire où l'on grave le nom du défunt et celui du curateur des obsèques (sans qu'il ait paru utile d'indiquer quel lien, de parenté ou autre, avec défunt, justifie l'intervention du curateur). Un certain nombre d'années passent, puis (B) la pierre sert de support à une nouvelle inscription, celle-ci à verbe ieuru(s), émanant de l'ancien curateur et de son fils.
Whatmough (Whatmough 1949 ) considère comme identiques dans leur nature les deux interventions (A, B), d'Aneunos, d'où il conclut que ieuru et εποει s'équivalent. Il ne précise pas quel sens il donne au verbe. Si c'est celui d'une signature artisanale, on débouche sur l'absurde (il n'y a pas eu deux façonnages de la stèle, en un temps A puis en un temps B). Si c'était celui d'une curatelle (ce à quoi, apparemment Whatmough n'a pas songé), il s'agirait d'obsèques d'un second personnage (Elvontios), un événement qui demeure pensable. Mais a-t-on ailleurs des exemples d'une curatelle double (Aneunos + Lugurix) ?
Ce qui reste à établir, c'est si le remploi B de la pierre est funéraire comme son emploi initial A, et si Aneunos (seul, la première fois ; conjointement, la seconde) est intervenu deux fois de la même façon. Le raisonnement de Whatmough suppose, gratuitement, résolue cette question préalable.
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En faveur de l'hypothèse d'une seconde inhumation B pourrait jouer la justification de Elvontios comme anthroponyme : suffixation -ont-io- (cf. Holder 1962 II (860)) sur souche Elu- (cf. ελουισσα en VAU-05-05, ηλουσκονιος en BDR-12-06).
Mais argument non-décisif : le texte ieuru pourrait néanmoins être votif, Elvontios étant soit un homme à l'intention de qui la dédicace est faite (dativus commodi), soit une divinité locale dont la communauté d'initiale avec ελουισσα, ηλουσκονιος serait fortuite.
Et il existe, inversement, des arguments en faveur d'une dédicace à un dieu Elvontios.
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Il est normal que le personnage de premier plan (le défunt dans une épitaphe, le dédicant dans un texte votif) bénéficie d'une désignation pleine (idionyme + patronyme), à la différence des personnages accessoires (curateur des obsèques ; personne à l'intention de qui dédicace est faite). Or, si cette hiérarchie est respectée en A (défunt : [...]los Virilos / curateur : Aneunos), elle serait indûment bouleversée en B à supposer qu'il s'agit d'une seconde épitaphe (désignation bimembres pour l'un et l'autre curateurs, idionyme seul pour le défunt).
Ceci, déjà, détourne de penser que B soit un texte funéraire.
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Mais, plus encore, c'est tout le dossier ieuru qui exclut la signification enseignée par Whatmough à partir du seul texte de Genouilly superficiellement et abusivement exploité. L'article Lejeune 1980a examine d'ensemble la douzaine d'exemples εποει / ieurudont nous disposons, exemples inégalement clairs, mais d'où se dégage une unique signification possible, celle d'un verbe de dédicace.
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Il paraît donc, au total, envisageable que, sur une pierre originellement funéraire (qui lui appartenait juridiquement depuis que, curateur, il l'avait érigée), Aneunos a plus tard porté mention d'une offrande faite par lui-même et par son fils.
Mais chacun peut voir que bien des obscurités subsistent. Il faut supposer qu'une nécropole fut aussi le siège possible d'un culte (de divinités chthoniennes ?) comportant, en des occasions que nous ignorons, offrandes de la part de fidèles : le dieu local associé à ces rites funéraires serait-il Elvontios ? Conjectures fragiles aussi longtemps qu'on manquera de parallèles.
Remarques de Michel Lejeune : MLE-1-a MLE-2-a MLE-3-a
Il est très probable que les deux stèles (CHE-01-01 et CHE-01-02), de même matériau, de même type, de même écriture (en ce qui concerne les lignes 5-8 de I et les lignes unique de II), trouvées, de plus, conjointement (bien que non in situ) c'est-à-dire apportées ensemble de la zone d'extraction, ont la même origine et devaient avoir la même fonction.
Mais cette solidarité nous apparaît moins clairement à considérer les textes. Le mot unique de CHE-01-02 ne se retrouve pas en CHE-01-01. Il y a bien, en CHE-01-02 comme en CHE-01-01, une finale en -u ; mais cette terminaison (en soi, ambiguë : datif singulier de seconde déclinaison ? nominatif singulier de thème à nasale ?) a-t-elle même fonction en CHE-01-01 et en CHE-01-02 ?
Si l'analyse développée pour la stèle CHE-01-01 est admise, on tiendra CHE-01-02 comme funéraire par destination, comme l'est primitivement CHE-01-01, mais sans réutilisation ultérieure.
Le défunt de CHE-01-02 est ce personnage à nom en ...u, où l'on verra, comme on voudra, un nominatif masculin en -ū (thème nasale) ou un datif masculin en -ū (de seconde déclinaison).
Mais cette solidarité nous apparaît moins clairement à considérer les textes. Le mot unique de CHE-01-02 ne se retrouve pas en CHE-01-01. Il y a bien, en CHE-01-02 comme en CHE-01-01, une finale en -u ; mais cette terminaison (en soi, ambiguë : datif singulier de seconde déclinaison ? nominatif singulier de thème à nasale ?) a-t-elle même fonction en CHE-01-01 et en CHE-01-02 ?
Si l'analyse développée pour la stèle CHE-01-01 est admise, on tiendra CHE-01-02 comme funéraire par destination, comme l'est primitivement CHE-01-01, mais sans réutilisation ultérieure.
Le défunt de CHE-01-02 est ce personnage à nom en ...u, où l'on verra, comme on voudra, un nominatif masculin en -ū (thème nasale) ou un datif masculin en -ū (de seconde déclinaison).
Remarques de María José Estarán :
En mi opinión, estamos ante dos inscripciones; no tres: una funeraria y otra honorífica; o ambas funerarias. La primera fue ejecutada por Aneuno, el autor material, que grabó el epitafio de Virilio. La segunda, realizada por Eluontiu y dedicada a dos individuos, bien por un honor recibido o bien a causa de su muerte. No pienso, como he tratado de explicar en Estarán 2021 , que ieuru sea « votivo », como se explica en la ficha. Es un verbo de dedicación; pero no necesariamente religiosa. El dedicante presenta nomen unicum (no es extraño) y los homenajeados / difuntos, nombre bimembre, todos perfectamente galos.
Remarques de María José Estarán :
Complexité de la langue et de l'écriture :
Première inscription
Deuxième inscription
Complexité de la langue et de l'écriture :
Première inscription
- Deux écritures pour le nom du défunt (pour quelle raison ?) et deux langues : gaulois (nom du défunt) et grec (signature de l'artisan)
- Pour le changement d'écriture pour la signature de l'artisan voir CDO-02-01.
Deuxième inscription
- une langue, une écriture.
Remarques de Alex Mullen :
It is unclear precisely how we should understand the components on this monument and how they fit together and how they relate to one another chronologically. It is clear, however, from the content that the texts are all connected. The order on the stone is as follows: Gallo-Latin (Gaulish in Latin script), Gallo-Greek (Gaulish in Greek script), Greek (language and script), Gallo-Latin (Gaulish in Latin script).
IEVRV example, Lambert 1979 , Lejeune 1980a , Estarán 2021 .
Bi-lingual text in Gaulish and Greek. Bigraphic text with Greek and Latin script used for Gaulish and Greek script used for Greek.
IEVRV example, Lambert 1979 , Lejeune 1980a , Estarán 2021 .
Bi-lingual text in Gaulish and Greek. Bigraphic text with Greek and Latin script used for Gaulish and Greek script used for Greek.
Photos
Bibliographie du RIG: Rhŷs 1906 ; Rhŷs 1911 ; Dottin 1918 ; Holder 1962 ; Whatmough 1970 ; Lejeune 1980a ; RIG I ;
CIL ; Arbois de Jubainville 1894 ; Laugardière 1894a ; Laugardière 1900 ; Rhŷs 1906 ; Thurneysen 1908 ; Rhŷs 1911 ; Dottin 1918 ; Whatmough 1949 ; Vendryes 1957 ; Holder 1962 ; Whatmough 1970 ; Lejeune 1980a ;
Bibliographie du RIIG: Lambert 1979 ; Lejeune 1980a ; Lambert 2018 ; Estarán 2021.
Linked Data:
- Deuxième moitié du Ier siècle : http://n2t.net/ark:/99152/p09hq4np73d
- Stèle : https://ark.frantiq.fr/ark:/26678/pcrtvpHLEemb4v
- Grès : https://www.eagle-network.eu/voc/material/lod/75
- Endommagée : https://www.eagle-network.eu/voc/statepreserv/lod/5
- Signature de l'artisan : https://www.eagle-network.eu/voc/typeins/lod/110
- Inscription religieuse / cultuelle : https://www.eagle-network.eu/voc/typeins/lod/81
- Inscription funéraire : https://www.eagle-network.eu/voc/typeins/lod/92
- Gravée : https://www.eagle-network.eu/voc/writing/lod/3
- Musée du Berry : https://www.trismegistos.org/collection/1483
- Bituriges Cubi : https://www.trismegistos.org/place/19901
- Genouilly : https://www.trismegistos.org/place/22636
- Aquitania : https://www.trismegistos.org/place/3924
- France : https://www.trismegistos.org/place/693
How to cite: Ruiz Darasse C., Blanchet H., Stifter D., Estarán M.-J., Mullen A., Chevalier N., Prévôt N., « RIIG CHE-01-01 », dans Ruiz Darasse C. (éd.), Recueil informatisé des inscriptions gauloises, https://riig.huma-num.fr/, DOI : 10.21412/petrae_riig_CHE-01-01 (consulté le 20 avril 2024).
XML EpiDoc
URI : https://riig.huma-num.fr/documents/CHE-01-01
Dernière modification : 2023-03-14; Michel Lejeune (First editor); Coline Ruiz Darasse (Project coordinator and contributor); Hugo Blanchet (Contributor); David Stifter (Contributor); María José Estarán Tolosa (Contributor); Alex Mullen (Contributor); Nolwenn Chevalier (Metadata, TEI encoding); Nathalie Prévôt (Database Design)